Cette exposition est l'occasion de présenter le travail des encres de cet artis te, prolongement de ses grandes peintures où la question de l'architecture cède la place à une déclinaison de jeux formels. Un autre groupe d'encres présente de manière frontale des extraits de textes sim ples au graphisme sobre et rigoureux, à la fois travail sur la typographie (type agence Integral Concept de Ruedi Baur, cette typographie est d'ailleurs Helvetica Majuscule) et usage abstrait de termes anglais. L'exécution se veut parfaite tout en acceptant de temps à autre de légers accidents. Loin d'être une leçon de maîtrise il s'agit là d'un travail de rigueur et de patience, début d'une série ouverte. Là encore le sujet des tableaux est sobre, la technique est précise, presque désincarnée. Le procédé aigu de la réalisation donne une impression de vibration. Les formats, eux aussi systématiques (chaque grande peinture mesure 1m x 1,5m , l'accrochage se fait au centre du panneau), laissent entrevoir la possibilité du cadre dans cette peinture.
Ce cadre n'est pas encadrement mais règle. Reste alors des variations dans les couleurs et dans les sujets, bien que tous extraits à des échelles différentes d'architectures simplifiés. Certaines laissent flotter un doute (classique dans la peinture depuis de Staël) sur leur attachement figuratif ou abstrait. L'absence de titre exclu toute possibilité d'interprétation ou de renseignement : ces tableaux valent alors pour ce qu'ils sont et non pour leur histoire causale.
Cette pratique emprunte aux codes de la peinture suisse (Decrozat, Daflon, Baudevin), tout en recyclant dans les sujets un répertoire propre à la peinture new-age de paysages urbains de la côte ouest des Etats-Unis. Le lien se faisant autour de la couleur, dans leur assemblage parfois volontairement incongru. Toutefois, il est à noter que ces architectures
dépouillées sont généralement de type moderniste (donc plutôt d'origine Allemande, Suisse ou New-Yorkaise, que Californienne comme les avaient décrite Ed Rusha), Nouvel argument en faveur d'une pratique formelle.
En prolongement de ces grandes peintures, une série de petits formats identiques (50 x 60 cm soit un rapport homothétique aux grands formats) créent le lien entre les encres et les peintures. On y retrouve une proximité plus évidente avec certaines références, de la montagne (clin d'oeil à Sainte Victoire au moment où Cézanne ouvre la brèche du paysage moderne ?), aux variations de tonalités proches de certains collages de Baldessari, en passant par les brouillons-feuilles de calculs des peintres minimaux (Lewitt). Toutefois la modestie de leur taille les écarte de l'ambition autoritaire de ces prédécesseurs et de ce fait les rendent à la fois simples et évidents.
C'est ainsi que cette exposition permet à la fois d'appréhender une pratique ambitieuse et retenue, exigeante et ouverte.